Maladie rare : le combat d'une maman

Il y a un mois, notre équipe est allée à la rencontre de Cécilia Mercurio maman de Lino, fondatrice de l’association Ma Fumarase Mon Energie et très engagée sur les sujets du Handicap. Pour la première fois, nous nous sommes assis avec un(e) de nos « cagnotteurs » pour recueillir son histoire et partager son témoignage avec notre communauté. Avocate de métier, Cécilia se bat sur plusieurs fronts : elle veut faire avancer la recherche clinique sur la maladie (rare) de son fils et milite pour la simplification des démarches administratives dans le handicap.

Interview réalisée dans les locaux d’Obratori à Marseille.

La Cagnotte des Proches rencontre une cagnotteuse
La Cagnotte des Proches rencontre une cagnotteuse

Qui es-tu ?

Je m’appelle Cécilia Mercurio, j’ai 43 ans. Je suis la maman de deux enfants, une fille de quatorze ans et demi qui s’appelle Elora, et un petit garçon, Lino, qui a onze ans et demi. Je suis avocate de profession, originaire du Var et j’ai grandi à Sanary.

Peux-tu nous parler de ton fils, Lino ?

C’est un petit garçon qui est en situation de handicap, qui est né avec une maladie génétique qui s’appelle le déficit en fumarase. 

C’est une maladie métabolique, c’est à dire que le système énergétique souffre d’un déficit en acides aminés qui s’appelle la fumarate qui ne se génère pas dans son corps, ou très peu, et qui crée un déficit énergétique à tous les niveaux, sur le plan moteur et cognitif. C’est une maladie qui n’a malheureusement pas de traitement.
Lino est un petit garçon très souriant, plein de vie et qui déborde de joie. C’ est une force pour notre famille.

Maladie rare

Quels sont les symptômes de sa maladie ?

Lorsqu’il est né, Lino n’avait aucun symptôme visible de sa maladie. C’est à partir de l’âge de six mois, lorsqu’on a dû commencer la diversification alimentaire, qu’il n’arrivait pas bien à s’alimenter. Entre six et huit mois, nous avons constaté qu’il ne réussissait pas à s’asseoir et c’est à partir de là que notre pédiatre nous a orientés vers la Timone (CHU de Marseille) pour réaliser des tests qui ont fait ressortir quelques mois plus tard la maladie de Lino, à savoir le déficit en fumarase.

Tu évoques souvent l’errance médicale qui entoure cette maladie ?

Oui. L’errance médicale est très variable en fonction des familles et de l’âge auquel l’enfant est pris en charge. Pour nous, il est vrai que la maladie a été découverte relativement tôt, permettant une prise en charge rapide. Mais certaines familles découvrent le déficit en fumarase alors que l’enfant a trois, quatre ans, car c’est une maladie tellement rare que les médecins ne recherchent pas forcément immédiatement la possibilité d’une maladie métabolique.

Comment va Lino aujourd’hui ?

Lino va bien, les médecins considèrent que sa maladie est fixée c’est-à-dire qu’elle n’entraîne pas de baisse énergétique ou de dégénérescence de ses capacités. Par contre, son manque important d’énergie implique forcément des conséquences : il a un handicap moteur du fait de son manque de tonus et un handicap mental car l’énergie est aussi nécessaire pour développer ces capacités là. Il n’a pas l’énergie de parler mais on a des nouveaux mots de temps en temps ! Par contre, il comprend beaucoup de choses. Il n’a pas l’énergie pour manger par la bouche en quantité suffisante, ce qui a nécessité un pose d’une gastrostomie, une sonde alimentaire qui permet à lino un apport calorique suffisant chaque jour.

Handicap

Lino se rend chaque jour dans un Institut d’éducation motrice près de Hyères, à Olbia, où l’ensemble de ses soins sont regroupés au même endroit. Il est très heureux d’y aller car il a une vraie vie sociale avec le personnel de rééducation et ses copains. il est en fauteuil manuel, qu’il arrive à manier vraiment très très bien.
C’est donc un petit garçon qui est content de vivre, très souriant, c’est un petit rayon de soleil, un petit garçon extraordinaire.

Handicap

Lino se rend chaque jour dans un Institut d’éducation motrice près de Hyères, à Olbia, où l’ensemble de ses soins sont regroupés au même endroit. Il est très heureux d’y aller car il a une vraie vie sociale avec le personnel de rééducation et ses copains. il est en fauteuil manuel, qu’il arrive à manier vraiment très très bien.
C’est donc un petit garçon qui est content de vivre, très souriant, c’est un petit rayon de soleil, un petit garçon extraordinaire.

Peux-tu nous parler de l’association que tu as créée ?

Quand j’ai appris la maladie de Lino en 2012, j’ai rapidement compris qu’il n’existait pas de traitement. Mais ce qui est le plus dur à encaisser c’est le fait qu’il n’y ait pas de recherche en cours ou de volonté de lancer des projets de recherche car les enfants touchés sont trop peu nombreux… J’ai donc durant plusieurs années tapé à toutes les portes jusqu’à ce qu’en 2019, le laboratoire APTEEUS, dirigé par Terence Beghyn me réponde et me propose de lancer un projet de recherche sur la maladie rare de Lino. C’est un appel que je n’oublierai jamais !

C’est ce qui a enclenché le lancement de l’association Ma Fumarase Mon Energie pour nous permettre de récolter des fonds et de financer ce projet de recherche. Ensuite, l’association a ravivé l’espoir de rencontrer d’autres familles françaises touchées par la même pathologie.

Ma Fumarase Mon Energie

Où en est le projet de recherche ?

Le projet de recherche est toujours en cours. Il y a deux phases : la première phase, c’est d’arriver à voir le défaut de la cellule de lino (cellule qui avait été prélevée quand il était bébé afin de faire poser le diagnostic) et que la cellule soit assez forte pour recevoir les 2000 molécules (les 2000 médicaments).

Recherche médicale

La phase 2 est de tester les 2000 médicaments pour voir si l’un d’eux permettrait d’être un traitement pour le déficit en fumarase. Aujourd’hui, on est encore à la phase 1. Il y a eu plusieurs essais depuis 2019 par le laboratoire APTEEUS mais malheureusement, jusqu’à présent, tous les essais n’ont pas permis de faire apparaître le défaut pour passer à la phase 2. Mais on ne perd pas espoir !

Recherche médicale

La phase 2 est de tester les 2000 médicaments pour voir si l’un d’eux permettrait d’être un traitement pour le déficit en fumarase. Aujourd’hui, on est encore à la phase 1. Il y a eu plusieurs essais depuis 2019 par le laboratoire APTEEUS mais malheureusement, jusqu’à présent, tous les essais n’ont pas permis de faire apparaître le défaut pour passer à la phase 2. Mais on ne perd pas espoir !

Quelle suite comptez-vous donner à ce projet de recherche ?

Avec le laboratoire APTEEUS, on a recherché des partenaires pour pouvoir continuer le projet et trouver de quelle manière on pouvait faire apparaître le défaut sur les cellules de lino. Et aujourd’hui, on est en collaboration avec un laboratoire allemand dirigé par le docteur Christian Frezza qui a accepté de s’impliquer dans le projet.

Ce laboratoire traite de la recherche contre les cancers générés par la mutation du gène de la fumarase et donc il connaît très bien finalement ce gène de la fumarase qui est le gène FH. A partir de janvier 2023, donc ça c’est la très bonne nouvelle, le Docteur Frezza a accepté de confier notre projet de recherche à l’un de ses post doctorants qui arrive en début d’année prochaine, ce sera l’une de ses missions. On espère que ces travaux permettront cette fois-ci de voir le défaut de la cellule afin de pouvoir procéder aux tests des médicaments.

Comment finances-tu ce projet de recherche ?

Faute d’aides des pouvoirs publics, c’est un projet de recherche 100% privé, grâce aux dons faits à notre association. La récolte de dons est donc essentielle pour qu’on puisse un jour arriver à finaliser le projet de recherche et trouver un traitement.

Échanges-tu avec les autres familles ?

Oui? on échange régulièrement. Lorsque j’ai créé l’association, je ne connaissais aucune famille dont l’enfant était atteint d’un déficit en fumarase, sachant que lino était le 3ème enfant en France. Depuis sa création, j’ai non seulement été contactée par l’une des deux premières familles mais également par 4 autres familles qui ont appris que leur enfant souffrait de cette maladie. On a créé un petit groupe fermé sur Facebook qui nous permet d’échanger, de discuter. On se soutient quand l’une ou l’autre des familles a besoin de parler, on s’entraide mutuellement à chaque étape.

Comment pourrait-on aider les familles ?

Il y a beaucoup de choses à améliorer dans le soutien à apporter aux parents qui viennent d’apprendre la maladie de leur enfant. Ils sont sous le choc du diagnostic et sont souvent seuls pour connaître les démarches et les droits auxquels ils peuvent bénéficier. Il faudrait que les démarches soient plus faciles, moins chronophages comme la fréquence du renouvellement des dossiers MDPH qui nous prennent beaucoup de temps sans compter que raconter la maladie de notre enfant remue à chaque fois.

Annonce diagnostic

Avocate de métier, tu viens de valider une formation de “médiatrice”, qu’est ce qui te pousse à développer ce service ?

Si j’ai voulu être avocate, c’est véritablement pour assister toute personne qui rencontre un problème juridique. Cependant, nous sommes confrontés aujourd’hui à une longueur très importante des procédures judiciaires ce qui ne permet pas d’apporter à nos clients un règlement rapide de leur problème. Et malheureusement, le secteur du handicap n’est pas épargné par ce (triste) constat. Le processus de médiation permet ainsi de régler amiablement une situation conflictuelle dans un délai rapide et à moindre coût pour les personnes.

Cécilia Mercurio

C’est le même problème pour tout comme les questions relatives aux orientations professionnelles en ESAT, aux aides financières comme la prestation de compensation du handicap, etc..
Les familles se retrouvent seules avec leur problème sans solution rapide et adaptée à leurs besoins et sont parfois dans des situations de grande détresse.
Je pense que la médiation pourrait véritablement être une solution offerte aux familles pour éviter de saisir la justice. Ce serait une étape préalable entre la décision rendue par l’administration qui ne convient pas aux familles et qui leur permettrait de se réunir avec l’organisme public qui a rendu la décision pour rediscuter amiablement de la situation.

Cécilia Mercurio

C’est le même problème pour tout comme les questions relatives aux orientations professionnelles en ESAT, aux aides financières comme la prestation de compensation du handicap, etc..
Les familles se retrouvent seules avec leur problème sans solution rapide et adaptée à leurs besoins et sont parfois dans des situations de grande détresse.
Je pense que la médiation pourrait véritablement être une solution offerte aux familles pour éviter de saisir la justice. Ce serait une étape préalable entre la décision rendue par l’administration qui ne convient pas aux familles et qui leur permettrait de se réunir avec l’organisme public qui a rendu la décision pour rediscuter amiablement de la situation.

Par exemple, je pense aux parents qui déposent une demande à la MDPH pour une orientation scolaire de leur enfant dans un centre spécialisé et qui se voient notifier un refus après des mois d’attente. La seule solution qui leur est ouverte aujourd’hui est de former un recours devant les tribunaux. Cependant, le délai pour que leur affaire soit évoquée devant le juge peut facilement se faire deux ans après laissant les familles sans solution pendant ce temps là.

refus MDPH

Par exemple, je pense aux parents qui déposent une demande à la MDPH pour une orientation scolaire de leur enfant dans un centre spécialisé et qui se voient notifier un refus après des mois d’attente. La seule solution qui leur est ouverte aujourd’hui est de former un recours devant les tribunaux. Cependant, le délai pour que leur affaire soit évoquée devant le juge peut facilement se faire deux ans après laissant les familles sans solution pendant ce temps là.

refus MDPH

Concernant le handicap, la médiation devrait avoir toute sa place compte tenu des délais très importants pour obtenir un jugement lorsqu’est contesté une décision administrative car les personnes concernées se retrouvent pendant ce laps de temps dans des situations très difficiles.

En tant que médiatrice, avec quels organismes pourrais-tu discuter ?

Les interlocuteurs seraient les organismes décisionnaires, la MDPH, le Département, la CAF, mais aussi la sécurité sociale. Tout organisme impliqué dans les décisions concernant notre proche en situation de handicap.

Quelles sont les situations administratives que les familles ont à traverser ?

C’est d’une lourdeur sans nom… Personnellement, mon fils a une maladie qu’il aura à vie, et, par exemple, jusqu’à aujourd’hui, j’ai dû renouveler sa carte d’invalidité et sa carte de stationnement en moyenne tous les trois ans. Donc en plus de la gestion de la maladie de notre enfant, les parents sont contraints de renouveler ou monter régulièrement des dossiers liés au handicap de leur enfant ce qui est administrativement et émotionnellement très lourd à gérer. Cela vous oblige à raconter à chaque fois le handicap de votre enfant, à répéter l’exercice pour chaque matériel dont notre enfant a besoin : siège de bain ou wc adapté, une chaise thérapeutique, etc., tout ceci contribue à user les familles alors qu’elles ont besoin d’être soutenues et certaines se découragent et ne font pas la demande…

L’autre difficulté aussi, c’est le décalage entre le jour où naît le besoin et la date de la décision. Nous devons  mettre un devis dans le dossier mais la décision va être rendue plusieurs mois plus tard alors que notre  proche en situation de handicap en a besoin immédiatement. et il n’est pas accepté de faire l’avance et de se faire rembourser ensuite. Tout cela devrait être repensé pour soulager les familles.

As-tu le soutien de ton entourage ?

Le projet de recherche est toujours en cours. Il y a deux phases : la première phase, c’est d’arriver à voir le défaut de la cellule de lino (cellule qui avait été prélevée quand il était bébé afin de faire poser le diagnostic) et que la cellule soit assez forte pour recevoir les 2000 molécules (les 2000 médicaments).

Handicap

Ma famille a un rôle essentiel : que ce soit mes parents qui sont mes véritables piliers, mes sœurs Alexandra et Sandy. Ils me soutiennent au quotidien, et sincèrement, je ne sais pas comment j’aurais pu faire sans eux. Ma fille Elora est aussi exceptionnelle. Elle va avoir quinze ans et elle a une super relation avec Lino..

Mes amis sont également présents, j’ai la chance d’avoir mon amie Sandie, qui est également mon associée qui m’a toujours soutenue et me relaie quand je dois me rendre à l’hôpital pour Lino. J’ai donc beaucoup de chance d’être aussi bien entourée.

Handicap

Ma famille a un rôle essentiel : que ce soit mes parents qui sont mes véritables piliers, mes sœurs Alexandra et Sandy. Ils me soutiennent au quotidien, et sincèrement, je ne sais pas comment j’aurais pu faire sans eux. Ma fille Elora est aussi exceptionnelle. Elle va avoir quinze ans et elle a une super relation avec Lino..

Mes amis sont également présents, j’ai la chance d’avoir mon amie Sandie, qui est également mon associée qui m’a toujours soutenue et me relaie quand je dois me rendre à l’hôpital pour Lino. J’ai donc beaucoup de chance d’être aussi bien entourée.

Pour en savoir plus sur l’association Ma Fumarase Mon Energie : https://www.facebook.com/asso.mfme/
Le cabinet d’avocat de Cécilia Mercurio : https://www.cm-avocats-toulon.com/
Christophe Roturier
Christophe Roturier

Véritable Globe-trotter et entrepreneur dans l’âme, Christophe a co fondé La Cagnotte des Proches et dirige aujourd’hui la plateforme.

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